Imposition confiscatoire et garantie de la propriété

InnondationL’art. 26 al. 1 Cst. consacre le principe de la garantie de la propriété, qui vise à sauvegarder la propriété en tant qu’institution de notre ordre juridique. Le législateur ne doit pas adopter une norme qui supprime cette institution juridique, la rend vaine, la vide de sa substance ou porte atteinte à son noyau intangible.

La garantie de la propriété ne va, en matière fiscale, pas au-delà de l’interdiction d’une imposition confiscatoire, cette dernière portant atteinte à l’institution même de la propriété privée.

Pour juger si une imposition a un effet confiscatoire, il faut examiner la charge que représente l’imposition sur une assez longue période, en faisant abstraction des circonstances extraordinaires ; à cette fin, il y a lieu de prendre en considération l’ensemble des circonstances concrètes, la durée et la gravité de l’atteinte, ainsi que le cumul d’autres taxes ou contributions, et la possibilité de reporter l’impôt sur d’autres personnes (ATF 122 I 305 consid. 7a ; 128 II 112 consid. 10b.bb et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_579/2009 du 26 juin 2010).

Le Tribunal fédéral a notamment admis que le noyau essentiel de la propriété privée n’est pas touché si, pendant une courte période, le revenu à disposition ne suffit pas à s’acquitter de la charge fiscale sans entamer la fortune (ATF 106 Ia 342 consid. 6c p. 353 ; arrêts du Tribunal fédéral 2P.139/2004 du 30 novembre 2004 consid. 4.1 ; 2C_277/2008 du 26 septembre 2008).

Le Tribunal fédéral fait preuve d’une grande retenue dans l’admission du caractère confiscatoire d’une imposition, qu’il n’a constaté qu’à une reprise, dans le cadre d’une rente viagère constituée par disposition pour cause de mort, relativement à laquelle l’impôt sur les successions et l’impôt sur le revenu, combinés, représentaient 55 % du montant des rentes d’une personne ayant une capacité contributive réduite.

Dans le canton de Genève, a été jugé confiscatoire une imposition totale sur le revenu et la fortune représentant 98,5 % du revenu imposable des recourants, dont la situation sur ce point était durable (ATA/771/2011 du 20 décembre 2011 consid. 9). Même conclusion s’agissant d’une imposition totale, tant sur le revenu que sur la fortune, équivalant à 92.36 % du revenu imposable ICC de la contribuable, ce qui épuisait la substance de l’objet imposable et empêchait sa reconstitution, l’atteinte s’inscrivant au demeurant dans la durée (ATA/818/2012 du 4 décembre 2012 consid. 9).

(ATA/1264/2015, consid. 7)

About Me Philippe Ehrenström

Ce blog présente certains thèmes juridiques en Suisse ainsi que des questions d'actualité. Il est rédigé par Me Philippe Ehrenström, avocat indépendant, LL.M. (Tax), Genève et Yverdon.
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