L’opération est tentante : plutôt que de s’embêter à créer une société, payer les éventuels droits de timbre, le notaire, etc., pourquoi ne pas racheter une société existante inactive, cas échéant encore pourvue de quelques actifs liquides, et commencer une activité nouvelle dans ce cadre ancien ? De la même manière, une liquidation de société est onéreuse, le bénéfice de liquidation est imposable, alors pourquoi ne pas simplement revendre ce nid à un nouveau coucou ?
C’est, en fait, une très mauvaise idée.
Le transfert d’un cadre (ou d’un manteau) d’actions consiste en une vente de droits de participation permettant à leur acquéreur de disposer d’une société non encore dissoute juridiquement, mais économiquement liquidée, alors même qu’elle peut avoir conservé au bilan certains actifs en liquide (argent comptant, avoirs en banques, titres cotés) déterminant la valeur vénale des actions. Cette opération est assimilée à une liquidation de société, suivie d’une nouvelle création, car elle présente les caractéristiques de l’abus de droit.
En effet, le vendeur de ces actions cherche, en principe, à éviter les frais et les impôts liés à une dissolution de la société, alors que l’acquéreur souhaite éluder le droit de timbre d’émission et les frais liés à la fondation d’une nouvelle société.
Dans de telles circonstances, le montant perçu par l’actionnaire doit donc être assimilé à un bénéfice de liquidation assujetti à l’impôt anticipé, déduction faite de sa part au capital-actions; même si ce montant ne lui est pas alloué par la société mais reste en possession de celle-ci sous forme de liquidités, il entre en effet dans le prix qui lui est versé par l’acquéreur du cadre d’actions et est assimilé, d’un point de vue économique, à un excédent de liquidation (RDAF 2000 II 227, consid. 4b et les références). Le droit de timbre d’émission sera également dû sur la fortune nette de la société ou, au moins, sur la valeur des droits de participation existants.
Pour être qualifiée de transfert d’un cadre d’actions, une vente doit aboutir économiquement au même résultat que la liquidation d’une ancienne et la fondation d’une nouvelle société.
Divers indices permettent de retenir l’existence d’un tel transfert, notamment des changements au sein du conseil d’administration ou la modification du siège, du but ou de la raison sociale.
Enfin, pour pouvoir imposer la vente d’un cadre d’actions au titre de l’impôt anticipé ou du droit de timbre d’émission, deux conditions cumulatives doivent être réunies: d’une part, la majorité du capital-actions doit avoir changé de mains, en un ou plusieurs paquets; d’autre part, la société doit être économiquement liquidée ou ses actifs avoir été rendus liquides.