Les principales conséquences fiscales du divorce ou de la séparation seront, le plus souvent, les suivantes : liquidation du régime matrimonial, contributions d’entretien et pensions alimentaires, interdiction du cumul des déductions et partage de la prévoyance professionnelle.
Concernant la liquidation du régime matrimonial, le principe est que les dévolutions de fortune ensuite de la liquidation du régime sont exonérées d’impôt sur le revenu (art. 24 let. a LIFD ; 7 al. 4 let. c LHID), quelles qu’en soient leurs causes. En contrepartie, l’époux débiteur ne pourra pas déduire le paiement effectué dans ce cadre. Par contre, si l’époux débiteur verse un montant supérieur à sa part légale selon le régime applicable, on retiendra qu’il y a donation pour cette partie excédentaire. Le versement d’une prestation en nature peut toutefois poser des problèmes de charges fiscales latentes (droits de mutation, impôt sur les gains immobiliers, frais et honoraires divers, etc.) qui doivent être pris en compte lors de la liquidation (cf. art. 211 CC : la fortune des époux à partager dans le cadre de la liquidation du régime doit être prise en compte à sa valeur vénale ; voir les exemples dans CPra Matrimonial – OBRIST, Annexe III, Aspects fiscaux, N 60).
Dans ce cadre, si des biens immobiliers sont transférés ou attribués exclusivement à un des époux ensuite du partage, il se posera des questions d’impôt sur les gains immobiliers et de droits de mutation. Pour ce qui est du gain immobilier, son imposition est différée en cas de transfert de propriété entre époux en rapport avec le régime matrimonial ou autres prétentions découlant du divorce pour autant que les époux soient d’accord (art. 12 al. 3 let. b LHID). Ainsi, les plus-values latentes en lien avec l’immeuble transféré ne sont pas imposées et la charge fiscale latente est transférée à l’époux qui reprend cette dernière. Les époux devraient d’ailleurs y faire référence explicitement dans leur convention de divorce. Les droits de mutation (syn. : droits d’enregistrement GE ou lods NE) frappent le transfert juridique et économique d’un bien à titre onéreux, ce qui est le cas d’un transfert entre époux découlant de la liquidation du régime matrimonial. Certains cantons prévoient alors l’exonération des droits dans ce genre d’hypothèse, d’autres des taux préférentiels.
Concernant les contributions d’entretien, elles sont, comme les pensions alimentaires, imposables chez celui qui les reçoit et déductibles pour celui qui les paie. Ce régime, qui déroge au régime général applicable aux dépense d’emploi du revenu, s’interprète restrictivement et ne s’applique donc pas aux créances découlant de la liquidation du régime matrimonial, à l’indemnité équitable post-divorce, etc. Ces prestations, pour être déductibles/imposables, doivent effectivement avoir été versées par le débiteur et acquise par le conjoint créancier. Si l’époux créancier a recours à un service d’avance et de recouvrement des pensions alimentaires, les prestations de celui-ci sont imposables. Le débiteur doit pouvoir par contre déduire les remboursements qu’il effectue à ce service, même s’ils n’ont pas lieu pendant la même période fiscale. L’imposition/la déductibilité des contributions d’entretien ont lieu dès la séparation, et ne sont pas converties ou annualisées pour le calcul du revenu imposable et pour la fixation du taux d’imposition.
Sont en principe assimilés à des contributions en espèces imposables /déductibles les autres prestations relevant de l’entretien telles que paiement direct par l’époux débiteur de créances d’impôts ou d’assurance, la mise à disposition d’un logement, le paiement d’intérêts passifs, etc.
Le paiement de contributions d’entretien sous forme de capital, possible en droit civil, mais guère pratiqué, éteint toute dette future et est donc considéré comme n’étant ni imposable ni déductible (art. 34c LIFD). La distinction entre prestation périodique et prestation en capital se fait en retenant que la première a un caractère viager, et donc qu’elle s’éteint au décès du débiteur ou du créancier, quand bien même elle serait prévue pour une durée déterminée.
Les contributions d’entretien aux enfants mineurs sont versés au parent qui a l’autorité parentale ; elles sont imposables chez le parent qui les touche et déductible pour celui qui les paie (art. 23 let. f, 33 al. 1 let. c LIFD ; 7 al. 4 let. g, 9 al. 2 let. c LHID). La situation des pensions versées aux enfants majeurs, quand ceux-ci sont, par exemple, en train de poursuivre des études, est différente : elles ne sont ni imposables ni déductibles (la question de la déduction pour enfant est distincte). Cette différence se justifie par la référence faite par les dispositions fiscales à l’autorité parentale, mais elle entraîne, dans la pratique, une charge parfois lourde pour le parent débiteur selon les dispositions de droit civil sur l’obligation d’entretien de l’enfant majeur. La déduction/l’imposition de la contribution pour enfant n’a donc lieu que jusqu’au jour où celui-ci atteint l’âge de 18 ans révolu (pour le mois entier) ; elle n’est pas prorogée jusqu’à la fin de la période fiscale (31.12). On prendra également soin au fait que la prestation à l’enfant majeur peut aussi, sous l’angle fiscal, constituer une donation.
En cas de taxation séparée, le Tribunal fédéral a posé le principe de l’interdiction du cumul des déductions (Kumulationsverbot – ATF 133 II 305 p.ex.), un même abattement ne pouvant être accordé plusieurs fois (déduction sociale pour enfant et barème parental). L’enfant doit donc être rattaché, aux fins de l’application des dispositions fiscales, à un seul parent, et c’est lui qui aura droit aux déductions pour enfant et assurances ainsi qu’au barème parental cas échéant. Ce rattachement, devant la complexité des situations familiales qui défie toute tentative de résumé, utilise des critères savants qui sont réunis dans la Circulaire AFC no 30 du 21.12.2010 sur l’imposition des époux et de la famille selon la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct , circulaire qui détaille les types de famille et les barèmes et déductions applicables dans chaque hypothèse. Le lecteur est ici renvoyé à la lecture de ces schémas, très didactiques ; on ne reprendra ci-après que quelques questions :
La déduction pour enfant est accordée pour tous les enfants mineurs qui suivent une formation, à la condition que le contribuable pourvoie de façon importante à leur entretien. Est supposé pourvoir de façon importante à l’entretien de l’enfant le parent qui a l’autorité parentale. Il bénéficie alors de la déduction et du barème parental.
Lorsque les parents sont imposés séparément et en cas d’autorité parentale conjointe, il convient d’abord de regarder si une contribution d’entretien est versée. Dans l’affirmative, le parent qui la reçoit est imposable sur cette contribution, et il a droit à la déduction et au barème parental (le parent débiteur peut déduire la contribution). S’il n’y a pas de contributions d’entretien, il faut se référer à la garde. S’il y a garde alternée par exemple, et en l’absence de contributions ou en cas de contributions équivalentes, le critère déterminant est l’importance de la garde exercée par chaque parent : la déduction pour enfant est partagée par moitié, alors que le barème parental va au parent qui assume la garde de fait la plus importante. En cas de garde d’importance comparable, le barème réduit et les déductions pour enfant et assurance sont accordés au parent qui a le revenu net le plus faible si aucune contribution d’entretien n’est versée et si chaque parent contribue à l’entretien à part égale selon le jugement de divorce (contrairement d’ailleurs à ce que prévoit la Circulaire no 30 selon l’arrêt du Tribunal fédéral 2C_534/2014 du 7 août 2015). Si les parents ne contribuent pas à part égale, on suppose que le parent qui a le revenu net le plus élevé contribue de manière plus importante à l’entretien.
Pour les enfants majeurs en formation, la déduction pour enfant va au parent qui assure l’entretien de l’enfant dans une large mesure. L’enfant peut donc également, en parallèle, réaliser des revenus propres, pour autant qu’il soit malgré tout dépendant de la contribution d’entretien. Le parent qui bénéficie de la déduction et qui vit en ménage commun avec l’enfant majeur bénéficie aussi du barème parental, selon la situation prévalant au 31.12.
Le divorce peut aussi avoir des effets concernant le partage de la prestation de sortie acquise en cours de mariage (art. 122 ss CC : partage de la prévoyance) et le versement de l’indemnité équitable fondée sur l’art. 124 CC.
Le transfert de tout ou partie de la prestation de sortie acquise pendant le mariage n’a pas de conséquence fiscale quand la prestation transférée à l’époux créancier reste affectée à des fins de prévoyance professionnelle. Elle sera transférée sur sa propre caisse de pension, sur un compte ou une police de libre passage – soit des cas de libre passage qui ne déclenchent l’échéance d’aucune prestation de prévoyance. L’imposition n’aura lieu que lors de la survenance d’un cas de prévoyance avec le versement de prestations réglementaires.
Si un cas de prévoyance est survenu (retraite, invalidité, etc.) l’époux débiteur doit à l’autre une indemnité équitable au titre de la prévoyance (art. 124 CC). Le traitement fiscal de celle-ci dépend dans une large mesure des modalités de son paiement. L’indemnité versée sous forme de capital par l’époux débiteur ne sera ni déductible pour lui ni imposable pour l’époux créancier. Si elle est versée sous forme de rente, elle sera imposable et déductible à hauteur de 40%. Si, enfin, l’indemnité consiste en un versement en espèce d’une partie de la prestation de sortie de l’époux débiteur chez qui aucun cas de prévoyance n’est survenu, elle sera imposable chez le bénéficiaire mais permettra au débiteur d’effectuer des contributions de rachat pour racheter la prestation de sortie transférée.
Un rachat de lacune de prévoyance découlant du divorce est possible, mais pose certains problèmes particuliers.
Selon l’art. 79b al. 3 1ère phrase LPP, les prestations résultant d’un rachat ne peuvent en effet être versées sous forme de capital par les institutions de prévoyance avant l’échéance d’un délai de trois ans. Le but est ici d’éviter des « va-et-vient » ayant pour seul but de constituer une prévoyance déductible puis fiscalement privilégiée au moment de son retrait sous forme de capital. Les institutions de prévoyance restent toutefois libres de verser une prestation sous forme de capital avant ce délai de trois ans pour autant qu’elles résultent de contributions ordinaires ou de contributions de rachat effectuées depuis plus de trois ans.
En cas de divorce, l’institution de prévoyance doit autoriser le conjoint débiteur à racheter la totalité de la prestation de sortie transférée à son ancien conjoint. Ce rachat est déductible et le délai de l’art. 79b al. 3 1ère phrase ne s’applique pas, l’évasion fiscale étant toutefois réservée.
La prévoyance individuelle liée (pilier 3a) est, quant à elle, englobée dans le régime des biens matrimoniaux. Son partage suit dès lors les règles du régime matrimonial. Il n’y a donc pas de possibilité de rachat ensuite du transfert d’avoirs en faveur de l’ancien époux comme en matière de LPP.