Système fiscal suisse : histoire, structure et compétences

Le système fiscal suisse reflète la structure fédéraliste de la Confédération et son histoire.

Chacun des 26 cantons dispose ainsi de sa propre loi fiscale, parfois très différente de celles d’autres cantons, malgré les dispositions de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID ; RS 642.14). Quant aux quelque 2’350 communes, elles peuvent soit percevoir des impôts communaux, soit prélever des suppléments (système dit des « centimes additionnels ») sur les impôts cantonaux.

Par ailleurs, la Confédération impose également le revenu. Toutefois, ses rentrées fiscales proviennent en grande partie d’autres sources, avant tout la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), mais aussi les droits de timbre, les droits de douane et les impôts de consommation spéciaux.

Historiquement, c’est à l’époque de l’Helvétique (1798–1803) que la Suisse connut son premier (et dernier !) système fiscal unifié. Il resta très largement théorique et inappliqué.

Après la chute de l’Helvétique et le retour à une Confédération d’États, les cantons retrouvèrent leur autonomie fiscale et leurs systèmes fiscaux se développèrent de manière assez indépendante. Cela entraîna une grande diversité, tant dans la conception des systèmes que dans l’aménagement des divers impôts.

Ainsi, alors que quelques cantons revinrent aux impôts indirects d’avant la Révolution française, à savoir surtout des impôts de consommation (droits de douane, péages etc.), les autres conservèrent les impôts issus de l’Helvétique, notamment l’impôt sur la fortune.

Ce système fut profondément modifié lors de la fondation de l’État fédéral en 1848.

La souveraineté douanière passa alors entièrement à la Confédération et les cantons se virent contraints de tirer leurs principales recettes fiscales des impôts sur la fortune et le revenu. Les impôts directs acquirent peu à peu une place dominante dans les systèmes fiscaux cantonaux, alors que la Confédération tirait l’essentiel de ses ressources des impôts indirects.

Suite aux conflits mondiaux, la Confédération et les cantons se virent contraints de modifier profondément leur législation et leur système fiscaux. La Confédération connu alors un accroissement spectaculaire de ses compétences fiscales pendant le XXe siècle : impôts sur le revenu et le bénéfice, droit de timbre, impôt anticipé, TVA, etc.

Au début de son existence, de 1941 à 1958, l’impôt fédéral direct (IFD, alors appelé « impôt pour la défense nationale ») était composé d’un impôt sur le revenu et d’un impôt complémentaire sur la fortune, par la suite aboli en 1959. Il frappe aujourd’hui (impôt fédéral direct) le revenu des personnes physiques et le bénéfice des personnes morales.

Les cantons passèrent également progressivement de systèmes fondés sur l’imposition de la fortune avec un impôt d’appoint sur le produit du travail à un impôt général sur le revenu avec un impôt complémentaire sur la fortune dont l’importance décroît aujourd’hui.

La souveraineté fiscale est donc, en Suisse, éclatée : tant la Confédération que les cantons, et même les communes, prélèvent des impôts.

Le droit de ces collectivités publiques de percevoir des impôts est toutefois limité au niveau de la Constitution fédérale (Cst.) Celle-ci partage en effet les compétences fiscales respectives. A ce titre, la Cst. donne par exemple à la Confédération le droit de prélever certains impôts et l’enlève aux cantons.

Ce système particulier est dû à la structure fédéraliste de la Confédération suisse, dont les grands principes sont définis à l’art. 3 Cst. : Les cantons sont souverains en tant que leur souveraineté n’est pas limitée par la Constitution fédérale et exercent tous les droits qui ne sont pas délégués à la Confédération.

Cela signifie que la Confédération ne peut prélever que les impôts dont la compétence lui a été déléguée selon la Cst. Les cantons en revanche sont en principe libres dans le choix de leurs impôts (dans les limites de la LHID), à moins que la Cst. ne leur interdise expressément de percevoir certains impôts ou les réserve à la Confédération.

Le fait que la Cst. octroie à la Confédération la compétence de prélever un impôt n’exclut toutefois pas toutefois le droit des cantons de percevoir un impôt du même genre, sauf interdiction expresse. Il y a ainsi des compétences fiscales parallèles (impôts directs), d’autres qui sont exclusives.

Alors que la Confédération et les cantons, en tant qu’États souverains, possèdent une souveraineté propre en matière fiscale, les communes ne peuvent en revanche prélever des impôts que dans les limites de l’autorisation qui leur est octroyée par l’organisation cantonale. Il s’agit alors de compétences déléguées.

(Conférence suisse des impôts, Le système fiscal suisse, 16e éd., Berne, 2015, pp. 6-12)

About Me Philippe Ehrenström

Ce blog présente certains thèmes juridiques en Suisse ainsi que des questions d'actualité. Il est rédigé par Me Philippe Ehrenström, avocat indépendant, LL.M. (Tax), Genève et Yverdon.
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